LA LUNE ET LA TERRE

 

La Lune serait bien fille de la Terre

La Lune serait bien fille de la Terre

 

 

 

Une étude renforce l'idée que notre satellite est né

de la collision entre notre planète et un corps céleste de la taille de Mars.

 

Dans son cycle de science-fiction Fondation, Isaac Asimov imagine une description légendaire de la Terre, la planète originelle oubliée de l'humanité. Elle est décrite comme une boule couverte d'océans accompagnée par un gigantesque satellite naturel, dont le rayon fait le quart de sa compagne. Personne ne croit à cette histoire, perçue comme une fable pour enfants, tant ce couple paraît incongru.

Voilà une belle manière de saisir à quel point l'existence de notre Lune peut sembler inattendue. Pour la Terre, le scénario de formation le plus simple suppose une collision avec un impacteur de la taille de Mars, 100 millions d'années environ après la naissance du Système solaire. Pour expliquer les orbites respectives de la Terre et de la Lune, il faudrait que cet impacteur arrive sur une trajectoire proche de celle de notre planète. Pourquoi pas après tout. Mais dans ce cas, les modèles montrent que la Lune serait composée à 80 % de matériau provenant de ce corps étranger.

Une même composition en oxygène

Voilà qui pose un fâcheux problème puisque la composition de la Lune est presque exactement la même que celle de la Terre. Les rapports isotopiques de l'oxygène, c'est-à-dire les quantités relatives entre différentes sortes d'oxygène dont le noyau atomique ne pèse pas exactement le même poids, sont quasiment identiques. Or, chaque corps du système solaire possède une signature isotopique de l'oxygène particulière. La probabilité qu'un impacteur ait la même composition semblait presque nulle.

Jusqu'à aujourd'hui. Une équipe internationale montre dans la revue Nature que cette situation pourrait être relativement commune. «Nous avons fait tourner des modèles avec un millier de corps d'une centaine de kilomètres de diamètre et une centaine d'un millier de kilomètres environ», détaille Sean Raymond, chercheur CNRS au laboratoire d'astrophysique de Bordeaux et coauteur de l'étude. «Nous avons alors regardé les grands impacts ayant touché la protoplanète la plus similaire à la Terre. Dans 20 à 30% des cas, la composition de l'impacteur était très proche.»

C'est un verrou fondamental qui vient ainsi de sauter. Plus besoin de scénarios exotiques de formation mettant en jeu des nuages de débris s'accrétant autour de la Terre. «C'est un travail de première importance», souligne Marc Chaussidon, spécialiste de la formation du Système solaire au Centre de recherches pétrographiques et géochimiques de Nancy. «Cela lève un obstacle majeur au scénario le plus simple de formation. Il reste néanmoins à voir si les hypothèses faites dans le modèle sont pertinentes et si on peut retrouver les signatures isotopiques d'autres éléments comme le silicium.»

Les chercheurs ont supposé par exemple que la distribution des isotopes de l'oxygène était proportionnelle à la distance par rapport au Soleil au début de leur simulation. «C'est vrai que nous ne sommes pas certains que ce soit le cas», concède Sean Raymond. «Selon les modèles les plus récents, l'influence gravitationnelle de Jupiter pourrait avoir concentré en une couronne le disque où se forment les planètes telluriques.» Perturbant du même coup cette distribution bien linéaire.

«Nous étions très excités par nos premiers résultats donc nous n'avons pas encore regardé plus avant. Mais nous allons maintenant travailler avec des modèles plus fins et regarder d'autres isotopes pour voir où cela nous mène. Je pense néanmoins que dans cinq ou dix ans, nous aurons une modélisation réaliste de la formation de la Lune.» Le rendez-vous est pris.

 

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